vendredi 19 décembre 2008

Bois mort (charrié par le fleuve), ou alors ?

J’essaie un peu. Non pas de revenir, où, venir, Qui, pour y faire quoi, voix que j’aime sans nostalgie, sans attente, sans oubli, voix qui se firent entendre, et de nouvelles sollicitudes venues de l’Inconnu, la grande terre qui devient si vite parfaitement inconnue, mes voisins (certains parlent en ce moment dans une langue que je ne parviens pas à reconnaître, pour y faire quoi, pour y dire quel désir, quelle tristesse, quelle amertume, on ne saura jamais), la route, encore sonore, au delà des Maisons, ai-je seulement vu à quelle hauteur ces Maisons se dressent, coupant le ciel, combien de vies, souffle proche, le mien, "qui pourrait se targuer, avec les quelques connaissances trompeuses qu’il croit posséder concernant son existence, ce processus dont le déroulement et l’issue (de secours ou fatale) sont totalement inconnus – surtout pour lui-même – si bien que…", comme dit Kertész (dans Le drapeau anglais), comme dit Qui, le jeune, le vieux, le formulable, l’informulable, le formulable qui formule des formulations pour "tire[r] un rideau sur la vie informulable qui se déroule dans l’ombre, tâtonne dans l’ombre, bref, sur la vie elle-même" ou l’informulable qui formule ou ne formule pas "littérature" ("Si la littérature est en mesure de produire de telles formules, je veux bien, mais je considère de plus en plus que seul le témoignage en est capable, ou éventuellement une vie muette et informulée comme formulation"), celui que j’étais (que je ne suis plus), ceux qui, celles qui maintenant, comment entendre le silence sans lui faire porter un poids indu, la pesanteur indue d’une interprétation (pour un peu j’aurais dit une Deutung, suis-je encore malade ?), ô mon beau silence des corps que j’espère à l’activité éparse de la banalité du calendrier du Christ mort, à l’enfantement des mots, des vies, des monstres qui déterrent les monstres, la vie parfois hachée, déchirée, mutilée, bribes de nos cœurs, fragments de nos vraies présences, velléités sincères de ces gestes arrêtés dans, arrêtés par le grand mouvement de la grande mobilisation permanente, à l’arrêt vers le silence coulé des profondeurs (ou vers l’urgence de la nécessité des êtres chers), le retard, l’avance, le chevauchement du retard qui s’avance dans la destruction de la fenêtre du Messie dépassé de Klee de Benjamin de Qui, voire ! si du moins, sans nostalgie, avons-nous jamais eu ou porté, avons-nous jamais supporté de porter ces visages que nous transportons à tombeau ouvert dans ces véhicules de toutes sortes qui nous transportent et nous véhiculent d’un endroit à un autre, villes, campagnes, chambres, bureaux, maisons, cafés, seuils quittés, pieds qui disparaissent, mains qui nous saluent, où revenir, Qui à revenir ou alors à venir dans le vieux fleuve identique à l’Obscur, être bois mort charrié, ou CROCODILE.


(Thierry.)

7 commentaires:

Anonyme a dit…

Cette satanée machine me dit "sonon", c'est à croire qu'elle tente de me reléguer du côté du silence. Et bien, si ! Bonsoir Thierry et merci pour cette parole de retour. J'aime mieux lire tes mots que du silence, tenter de te suivre (ouille) que d'interpréter des blancs. L'herméneutique du vide, très peu pour moi.
Sur les occurrences du calendrier, course aux festivités, sapin, buche, embuches, cadeaux et farce à dinde, nous avons de quoi nous occuper,la nouba obligatoire a peut-être retenu loin de leurs écrans en effet nos amis du bogue. En ce qui me concerne, autant dire franchement que je hais le père Noël.Avatar de l'ogre, bouffeur d'enfants mis au saloir, instrument de menace et chantage de parents inconscients !
J'ai passé quelques heures entourée d'enfants ce dimanche. On m'avait demandé une petite causette aux parents sur "Les mots de Noël", étymologies, croyances, solstice, retour de la lumière, crèche mangeoire, etc. Comme tu l'auras compris (et tous ceux qui lisent ces mots par dessus ton épaule, Thierry)notre calendrier n'arborait pas un Christ mort, mais une joie bien ancrée dans un Christ vivant.
Au fait, avons-nous jamais signé ici un contrat (style déontologique utopique) interdisant la politique, les opinions, les désirs ou la foi ? Alors, il est rompu !
La machine continue à dire "sonon", était-ce "sinon" ? Va savoir ?
Je referme ma lucarne à paroles, à qui le tour ?
Anne-Marie

Thierry Laus a dit…

Merci, Anne-Marie.

Je suis convaincu que le Christ peut parfaitement vivre dans le coeur de celles et de ceux qui désirent, de profondeur de vie secrète, lui prêter coeur, souffle et vie. Et respect.

Ah non, aucun contrat (fût-il tacite), sinon celui, rêvons encore, à nouveau, encore une fois, toujours, de donner libre essor à ce qui désire être dit (de profondeur de vie secrète ou de surface, de pensée ou de délire, de ces rêves ou de ces mots).

Si j'ose ici ou là partager ma désormais parfaite vacuité religieuse, c'est justement en espérant provoquer un tel partage (s'il est désiré, gare à cette religion de substitution encore chrétienne en quoi consiste la scène de l'Aveu), et pourquoi un "espoir"?

Peut-être seulement le bonheur de voir chacun respirer comme il l'entend (si la joie est bien ancrée, si le calendrier possède encore un coeur qui bat, des yeux qui brillent, petites ou grandes mains qui se touchent, transports de gestes, de choses, de sentiments), je ne crois plus personnellement à un Ciel qui puisse en personne se réjouir, mais encore (un peu) en ces vérités sublunaires, et alors, Accueil aux multitudes (pour autant qu'elles honorent ce qui souffle et périt sur la terre).

Bien à toi.

Anonyme a dit…

Ne pas laisser cette journée sans te remercier de ta réponse. Je la trouve délicate et sensible, c'est beau cette forme de vacuité, j'espère la garder vive moi aussi. Les certitudes sont une des pires choses qui puissent nous arriver. Accueil aux multitudes, oui, accueil aux différences, marcher vers le cœur, paupières fermés, mains ouvertes, finalement ce Noël là aussi est passé, cortège mêlé de joie sincère et de déréliction, son lot d'injustice et de tentatives de justesse. Bon, j'arrête, je fais des phrases : mauvais pour le teint.
Si nous sommes encore là tous les deux je te fais "la bonne année" le 31, d'acc ?
Affectueusement
Anne-Marie

Thierry Laus a dit…

Ambiance de terrain vague, entre les "fêtes", le silence, le froid de la saison, la fatigue, les lumières dans la tête, encore une année qui se ferme, les gens se souhaitant bientôt, oui, toutes sortes de voeux, de souhaits, de bonheurs, de lumières,...

Une pensée pour toi, Anne-Marie, un peu curieux pour moi de m'adresser à toi (ce prénom qui est celui de ma mère, que je n'ai jamais prononcé, ne connaissant de ce prénom qu'une seule personne, ma mère!),...

Bien à toi.

Anonyme a dit…

Mon petit fils de deux ans et demi a lui aussi du mal à comprendre que je m'appelle Anne-Marie, je suis d'abord sa mamie, évidemment ! Ce sont les vacances à Bayeux pour les deux petits, donc stage grand parental à plein temps...
Tes enfants sont eux aussi en vacances, les as-tu avec toi ? Vous devez être dans la neige en ce moment.

Euh !! Eh, Jean David, Ella, tous les amis, vous vous rendez compte où nous en sommes rendus ? Nagez-vous aussi dans le sirop ? Je vais tenter de concocter un petit message intello abstrait foutraque pour faire plus sérieux, sinon on va tourner Comtesse de Ségur !
Bises à Thierry et à tous les survivants du no man's land de la trêve des confiseurs.
Anne-Marie

Anonyme a dit…

Difficile d'entrer dans le dialogue.... et pourtant l'envie est forte, mais j'ai bien trop peur de faire "comtesse de Ségur" !

L'année s'achève, pincement au coeur.

Bises à tous et "bon bout d'an".

Michelle

Jean-David a dit…

Mais la comtesse de Ségur, c'est très bien, je trouve ! Et le sirop a toute ma sympathie. J'aime beaucoup la liqueur, par exemple, la liqueur de violette, difficile à se procurer mais délicieuse et d'une couleur... !
D'ailleurs, bien des discours "intellectuels" sont plus proches du sirop que de la liqueur.... ;))