mercredi 19 novembre 2008

Sincèrement


Je viens seulement dire bonjour, et le plaisir que j’ai à ouvrir cette fenêtre, jour après jour. Si je ne le fais pas dans un commentaire, c’est que, vais-je le dire? Ça n’est pas si facile, de parler. Il y a d’abord, quoique sans hiérarchie, la fatigue. J’aime à vous lire, j’aime à venir ici, et déjà, mais seulement peu à peu, je retrouve le plaisir de parler. Je veux dire que si je peux choisir, quels lieux, quels Espaces, quelles présences, j’ai du plaisir à venir ici. Comment organiser sa vie pour être en mesure de choisir ses lieux, ses Espaces, ses présences aimées, du moins le plus souvent possible? Je n’ai pas encore trouvé la clef. La vie s’organise autour de moi (rationnelle, sociale, professionnelle, humaine), un chaos. Je réponds. Je deviens ce chaos parfaitement cohérent (rationnel, social, professionnel, humain). Besoin de solitude. Antre dans lequel viennent ou reviennent les vraies voix, les vraies présences, le vrai chaos des vraies forces, les vérités qui meurent à la surface du jour, dans le déchaînement de la vie perdue (rationnelle, sociale, professionnelle, humaine). La réalité humaine que je côtoie est une réalité construite, un chaos (parfaitement cohérent). Allez savoir, je n’y suis pas. Je ne cherche plus à comprendre comment vous faites (si vous faites), comme ça se passe, normalement. Ce que nous cherchons à comprendre, nous finissons toujours par le comprendre, la Raison. Je rentre d’une fête scolaire (l’établissement de mon aîné a été construit en 1933). Le discours de la Directrice, le discours d’un Municipal (exécutif du cru), les chansons des enfants, le brouhaha de l’effervescence humaine. 1. Les enfants étaient heureux (ergo moi aussi). 2. J’ai le droit de (me) dire que je ne supporte pas cette effervescence des Evidences, ce brouhaha des Sentiments, ce chaos de la Raison (sociale, affective, professionnelle, humaine). Un caractère (une typologie, un Ordre, et un Jugement). Je m’en fous. Un seul souci: mes enfants. Une ascèse (ne pas leur transmettre, ou du moins ne pas leur transmettre volontairement, ou du moins,…), un peu désespérée. Me rassure le fait que leur maman est rationnelle, sociale, affective, évidente, sentimentale, normale. Bref, les enfants vont bien. Merveille de les voir aimer l’école, la maîtresse, ces chansons, et même le travail. Le cadet (en première année de maternelle): A l’école ce qui est bien c’est le jeu et le travail. Le travail? Oui, faire des fiches, pour remplir le classeur. Il aime bien (je dis tant mieux). Autour de moi (je vis en Suisse, à Lausanne), tout va merveilleusement bien. Il y a les drames personnels, les maladies, les accidents, mais tout va merveilleusement bien. Je le dis sans la moindre ironie. Et je dis tant mieux. Bien sûr, tout près, il y a aussi des saloperies sociales, politiques, économiques, etc. Les gens croient que la prospérité moyenne de la Suisse tient à leurs différents et nombreux mérites, etc. La misère se cache, ou est incarcérée (expulsée, si possible). Un équilibre personnel à trouver, sans doute, entre une sensibilité et une certaine capacité d’indifférence ou d’oubli, que cette vie qui va si merveilleusement bien autour de moi ne soit pas en permanence assombrie par ce qui fait la prospérité moyenne de la Suisse? Je peux, pour mes enfants. Avec eux je profite, petits films, forêt, jeux, comme je peux. Au delà, je ne peux pas (tant pis). Les enfants ont chanté trois chansons (avec plaisir). La première racontait (en gros): Le crayon veut le cartable, le cartable veut la table, la table veut l’école, etc. La deuxième, Sacré Charlemagne (autodérision institutionnelle, sans doute). Et la troisième, composée pour l’occasion (en gros): Notre école est merveilleuse, le préau est merveilleux, les maîtresses sont merveilleuses, les enfants sont joyeux, tout va merveilleusement bien. Avec un refrain qui disait (en gros): Si c’est vrai si c’est faux, mon nez qui bouge, tout rouge. Curieux. La vérité doit être beaucoup plus simple: On se fout des paroles, chanter est amusant. Oui. Curieuses paroles, quand même. Le bâtiment était bondé, partout des enfants, des maîtresses, des parents, des Officiels, etc. On monte, on descend, on remonte. Au fond je n’aime pas les adultes, je crois. Je n’ai jamais été agacé par un enfant, de ma vie. Est-ce que c’est vrai? Je fouille. Quand un enfant joue à l’adulte? Cela me peine. Je n’ai jamais été agacé par un enfant. Qu’on ne me fasse pas le coup de l’idéalisation, la vie d’un enfant peut être atroce (être livré, dépendant, l’Angoisse). Je ne crois ni à l’Innocence, ni au Bien (les enfants peuvent être cruels, etc.). Mais pas tant que ça, finalement. Sans doute que j’ai de la chance? Je ne sais pas. Je ne vois plus où est le problème. Ah oui, je n’aime pas les adultes. Ils sont ennuyeux. Monotones. Marionnettes. Pas vous! Je n’ai pas enregistré les Raisons sociales de toutes ces voix que j’aime à retrouver ici, un Amateur d’Art très érudit et un peu toqué, une dessinatrice qui surgit sur le tard (ressort ses crayons?), m’étonne, qu’Ella commande un lapin, écrive ce qu’elle écrit (pas encore lu!), je ne fais pas la liste, que nul ne se sente chagriné! (Sans parler de Gombrowicz, puisque j’y pense à chaque instant). Cela que je trouve si peu, dans ce qui fait l’écrasante réalité de ma vie, jour après jour? J’ai cessé de construire ou de dessiner des vaisseaux spatiaux, des monstres, des animaux. Je lis. Le théâtre est devenu bien trop sérieux, pour moi. Le cinéma ça va, parfois. On me raconte une histoire, on me montre des Images, au fond de mon lit. Je ne supporte plus tellement d’aller dans les salles à moins d’y aller avec les enfants (et dans ce cas le pop-corn appartient à ma cinéphilie). L’humour est triste ou cynique, autour de moi. Le mien est triste aussi, parfois. On n’a pas le droit d’être triste. La tristesse est une récréation, un soulagement, une vérité, pour moi. Sincèrement, je vous aime bien!

Thierry.


4 commentaires:

Thierry Laus a dit…

"Mettons que je n'ai rien dit"!

Sinon que, sincèrement, je vous aime bien!

(C'est fou quand même, maintenant que j'y pense, cette terre qui tourne en permanence, et sans jamais se plaindre!)

Ploum ploum.

Anonyme a dit…

je n'ai pas d'alternative (non plus) à proposer, je dirais seulement que ça n'est jamais que le Reflet de la vie telle que! en bien pire et en un peu mieux (parfois), du moins plus loin!

coucou chaleureux.
Anne-Marie
(toute ressemblance...)

Thierry Laus a dit…

Ah, dit comme ça, je comprends tout de suite mieux!

Anonyme a dit…

Une fois, j'allais fort mal. Je me suis forcé à écrire. Cela a donné un texte fort noir, notamment sur les deux côtés du manège, avec dedans le rire forcé des enfants et dehors le sourire forcé des adultes. et le cercle mercantile qui les sépare et les relie, et qi tourne absurdement si rond. Autour, un livre a pris corps. et je ne savais plus que faire de ses pages si noires qui en étaient pourtant l'origine. je les ai intégrées, à leur place, comme la vision illusoire que provoque l'angoisse, et sa rage de nier des deux côtés. On vit fort bien avec l'absurde: il suffit de changer de ton.