ADIEU
Entre le Maitre. Usé, décharné: il a passé tant d'années à parler. Chaque
leçon le laissait un peu plus maigre. C'est la dernière rencontre. Le Maître
va vérifier que ses leçons ont porté bons fruits. Il parle, il grogne (son
dentier ne tient plus très bien). Il grogne, puis il se tait.
Alors, tour à tour, s'expriment ses élèves. Chacun explique la parole du
Maître, ce qu'il a dit, voulu dire, et n'a pas voulu ne pas dire : tous se
contredisent et parlent encore et encore et soudain
chacun pâlit: s'ils allaient tuer le Maître? Chaque mot le laisse un peu
plus maigre. Sous la peau, ne reste plus rien de chair, ni de muscle. On
pourrait compter les os.
Alors, le Maître se lève. Il marche vers la porte et sans se retourner
profère: vous m'avez compris. Ou quelque chose de ce genre. Ou de très
différent. Ou rien : c'est un tel bruit d'os et de dents entrechoquées !
Mythique, Mutique, tout comme
Bonsoir à tous
(Ella Balaert)
2 commentaires:
Alors là je ne dis plus rien.
Magnifique.
(Mais le mot est bien faible.)
Qui va jouer le "rôle" du Maître ???
(pas moi, j'ai encore toutes mes dents !). Quoi qu'il en soit, au-delà de la poésie, c'est aussi une belle vision de l'exégèse.. Finalement, tout le monde a raison ? Cela me fait penser à Salvador Dali, impotent, des tubes dans le nez, à l'article de la mort, et qui signait toutes les grandes feuilles de papier blanc qu'"on" lui apportait, en bas à droite... en attendant que d'habiles "amis" y dessinassent de beaux "salvador Dali" ... (Oui, je suis un peu plus prosaïque, là)
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